L'arrêt du tram nord s'appelle « Trafalgar ».
Quel coup ! Les Anglais ont rêvé de cette station, les Alsaciens l'ont fait !
L'avis défavorable de la commission d'enquête au projet de tram nord de l'Eurométropole de Strasbourg aura des répercussions bien au-delà de la région. Nous venons d'assister à une première, un événement qui changera le comportement des municipalités. Nous avons assisté à la création d'une jurisprudence.
L'Eurométropole est blessée et humiliée, elle prépare sa revanche. Les prémices semblent indiquer que ce sera encore dans le rapport de force, dans une brutalité coutumière. L'inclusion proclamée par monts et par vaux a du plomb dans l'aile. Ce slogan pourtant matraqué depuis ce début du mandat municipal parait ne plus être de mise dans les proclamations. Les nouveaux supplétifs, ses administrés chouchoutés, les cyclistes vont se mobiliser pour sauver la citadelle de l'hôtel de ville, assaillie.
Prémisse... ou la folie des grandeurs.
Ce mandat avait commencé dans de mauvais hospices. La zizanie politique dans l'agglomération strasbourgeoise a permis à un outsider, le parti « Les Écologistes », de rafler la mise. Ceux ayant voté pour eux par pure stratégie politique pour une éventuelle alliance allaient le payer au prix fort. La liste verte gagnante aux élections municipales, selon le Code électoral, reçoit un nombre de sièges égal à la moitié du conseil. Une majorité absolue puisque les autres partis perdants sont répartis à la représentation proportionnelle. Passer de l'opposition aux commandes de la ville, cela laisse visiblement des traces. Sentiment de toute puissance, des conseils municipaux servant à faire le spectacle et les décisions de la majorité municipale votées comme un seul homme.
Un déni de démocratie et de pain bénit pour les journalistes à l'affut.
Imposer à tout prix une idéologie ne faisant pas l'unanimité.
Il était intéressant d'écouter, de lire, de voir le comportement des élus et de leurs proches dans leurs allocutions et sur les réseaux sociaux. L'écologie « punitive » était, du moins au début du mandat, explicitement revendiquée. Il faut nous changer et s'il le faut au forceps pour nous sauver de nos mauvaises habitudes.
Tout mouvement annonçant un meilleur avenir, fondé sur le changement radical de l’homme pour un meilleur être, est qualifié de « messianique ».
Cette « libération » forcée pour le bonheur vert est proclamée selon un principe idéologique permettant de mobiliser les individus et de leur faire accepter les sacrifices exigés. Payer sa dime pour tout acte pollueur, faire du vélo, jeter sa voiture aux orties, vivre en autarcie dans son quartier, s'occuper des damnés de la terre du plus loin possible de chez soi et avec des pincettes. Ostraciser les méfiants et les détracteurs de l'idéologie verte, pire, les harceler dans les réseaux sociaux pour les faire entrer dans le droit chemin. Si cela ne fonctionne pas, au mieux, cela les tiendra (peut-être) en respect.
Laisser impérativement une trace dans l'histoire de l'agglomération strasbourgeoise.
Parfaitement conscient d'être, malgré le soutien des purs et durs de la doctrine écologique, de plus en plus sous la critique des habitants, agacés par cet amateurisme maladroit et condescendant. L'équipe de l'Eurométropole doit marquer à son tour les esprits par un projet grandiose, de quoi les mettre sur les rails du tram pour les futures élections municipales. Et oui, ils ont pris goût au pouvoir, ils ne lâcheront rien et sont prêts à en découdre.
L'histoire du tram est accaparée en évinçant la porteuse du projet d'il y a trente ans, Catherine Trautmann. L'élu vert aime bien faire le coucou.
Le projet pharaonique du Tram Nord.
Il fallait au moins cela pour marquer les esprits, épater ses troupes et contraindre, une bonne fois pour toutes, les automobilistes à utiliser les mobilités douces : le vélo, la trottinette, le futur tram ou devenir un piéton pourchassé par les cyclistes.
L'échéance des futures élections municipales approche et n'ayant rien de probant à présenter aux futurs électeurs, l'Eurométropole a voulu marquer un grand coup, ce sera le faramineux projet du tram nord. Un colossal programme réalisé d'une seule traite dont le contribuable devra s'acquitter. L'idéologie n'a que faire des soucis des fins de mois.
Pour l'Eurométropole, ce projet devait changer les habitudes, les mentalités des usagers de la route et des transports par l'implantation du réseau de tramway entre Strasbourg, Schiltigheim et Bischheim.
Imposer un concept contraignant en espérant que la résilience des usagers opère. Et, assurément, ces derniers ont une patience et une endurance à toute épreuve depuis 2020. La question est de savoir si le punitif astreint à certains administrés pour la grande joie des convaincus des actions des mairies vertes n'assume pas un certain masochisme. Les élections municipales de 2026 indiqueront si c'est vraiment le cas.
Un projet confronté à la dure réalité de l'enquête publique.
Il s'agit d'un dispositif d'information et de recueil des avis de la population conduit par une commission d'enquête menée par un président et quatre membres. Ils sont désignés par le président du Tribunal administratif.
Cette enquête est organisée par l'Eurométropole.
La consultation du public se limite à une simple mise à disposition des documents relatifs au projet permettant le recueil de ses observations.
Habituellement, une formalité pour accepter les projets. En revanche, nos décideurs, toujours aussi gaffeurs et à côté de leurs rails, n'ont pas vu venir l'imbroglio.
Sûre de sa préséance, l'Eurométropole fit la promotion du projet. Ce n'était pas un échange avec la population, mais de réunions d'information pouvant faire comprendre que la décision était déjà actée. De quoi agacer les habitants qui réagirent avec 7 102 contributions enregistrées durant la période de l'enquête ! 43 474 visiteurs ont consulté le site internet dédié à l’enquête publique. L'Eurométropole voulait du colossal, elle y a eu droit.
Un « amateurisme » dégageant une incompétence teintée de mauvaise foi.
La commission d'enquêtes a fait son travail, donnant de bons points et des mauvais.
Cela commence fort, la commission se plaint des documents fournis ou pas par l'Eurométropole. Les enquêteurs doivent jouer aux détectives, assembler un puzzle avec des éléments manquants et une suspicion de mauvaise foi.
Amateurisme ou incompétence ?
L'avis du public est sans appel : seulement 16,8 % sont favorables, une majorité de 73 % opposée. Encore un chiffre colossal qui nécessita un procès-verbal de 50 pages de la commission d'enquête.
Associations contre les associations.
Si les associations proches de la mairie firent une campagne de communication sans précédent pour soutenir le projet, les opposants à celui-ci ne restèrent pas inactifs. Le tramway, oui, mais pas une performance idéologique contre les intérêts de la population. Le collectif « Pour un meilleur Tram » est créé. Force de propositions, elle suggère un tracé plus proche des centres-villes avec de meilleures dessertes pour tous. La voiture n'étant pas une ennemie et les piétons, des marathoniens. L'Eurométropole snobera toute tentative de dialogue.
La sanction.
Point après point, les commissaires enquêteurs soulignent des lacunes majeures :
- un manque d'écoute des habitants et des usagers ;
- des questions sensibles ignorées ou contournées ;
- des dissimulations, des incohérences ;
- des solutions générant de nouveaux problèmes et des dénis de réalités sur les conséquences ;
- des risques réels pour la gestion de la sécurité de la ville.
La sidération !
Alors que les troupes vertes se voyaient déjà, équipées de bottes et de casques de chantier, pour visiter les sites du Tram juste avant l'échéance des élections municipales, ce fut un coup de massue.
L'Eurométropole, ses élus verts persuadés d'avoir été les lauréats d'un projet extraordinaire du tram nord retrouvent leurs places de cancres près du radiateur d'avant 2020. Colère et honte absolue, ils réagiront comme à leurs habitudes.
Ce knock-out déjà devenu célèbre, ces 24 heures sans réaction à part devant la télévision régionale, mais avec parcimonie, ont permis de montrer cette sidération du sommet à la base des militants verts. Ce qui fait la joie des opposants au projet et d'appuyer la demande d'une véritable concertation citoyenne. Mais, personne n'était dupe, l'Eurométropole allait réagir par le biais des réseaux sociaux de façon agressive.
Les noms d'oiseaux.
Après une journée plongée dans les nimbes, les relais, pour ne pas dire les « trolls » de la sphère verte, recommencèrent leur travail de sape dans les réseaux sociaux. Les opposants sont nommés les « réacs » ou encore les « bagnolards », l'équité de la commission d'enquêtes est mise en cause. Nous passons de la sidération à la « conflituaction » habituelle.
La tentation du coup de force.
Devant l'humiliation de l'Eurométropole, des décideurs et de leur base, les écologistes se rassurent en montrant leurs muscles, forts de leurs 27 associations satellites de l'agglomération de Strasbourg. Le moment est à l'indignation pour cet avis défavorable, celui des rassemblements des convaincus du punitif et de la petite reine se préparent. À défaut de la prise du Capitole, on demande au préfet de passer outre l'avis défavorable...
Vivement 2026.
Prochain article : la conférence de presse du collectif « Pour un meilleur Tram » et une interview exclusive.
Maxime Gruber
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